Les beaux jours sont arrivés. Oui,
mai, qui jusqu’à présent n’avait pas été si clément, nous a accordé enfin le
beau temps tant espéré. Les oiseaux chantent, les fleurs sont écloses, les
lunettes, les espadrilles et les jupes sont de mise, bref, l’été s’est annoncé
un mois avant l’heure, et personne n’y voit franchement d’inconvénient. Au
contraire, j’y vois même l’occasion de faire le point. Quoi de mieux pour
s’assurer de notre bonne santé musicale qu’une sobre et élégante
sélection pré-estivale ? J’ai décidé cette fois de me concentrer sur les
maxis, le format prêtant plus à l’écoute légère et rafraîchissante que la
saison requiert. Malheureusement, le ton que prennent mes récentes sessions ont
plus propice au deuil qu’à la joie de vivre. Mais peu importe, cela n’empêche
en rien une courte revue des dernières surprises en date. Voilà donc 4 double-faces
que vous devriez retrouver chez votre disquaire, et qui accompagneront vos
moments de solitude à merveille.
Thursday, May 31, 2012
Sunday, May 20, 2012
Focus - Kontra-Musik
Kontra-Musik, avec sa petite trentaine de releases, commence à
avoir du passé. En invitant des artistes comme Dettman, Substance ou Silent Servant à les remixer, les
suédois ont acquis une notoriété ainsi qu’une légitimité. Depuis 2006, Agaric
et ses camarades ont sorti LP de qualité sur LP de qualité, préférant (bien qu’il n’y paraisse pas)
le long format afin d’exprimer toute leur passion. Car voyez vous Kontra-Musik n’est pas un de ces labels
ou paraissent mille EPs à l’année, de plus ou moins bonne facture, pour tomber
dans l’anonymat six mois plus tard. Chaque sortie est une occasion de montrer
leur amour pour ce qu’ils font, et ne doit donc en aucun cas être gaspillée au
profit de desseins commerciaux peu louables ; les suédois revendiquent une
authenticité et une exigence digne des plus grandes formations, rentrant ainsi
dans la cour des grands quand il s’agit de qualité. Kontra-Musik cherche à créer l’intemporalité, cherche à marquer son
auditoire avec des productions émouvantes, en plus d’être puissantes. Le LP de Jason Fine de 2008, Our Music Is A Secret Order, faisait
figure d’exemple, et presque de précurseur en la matière. Un album transgenre,
hésitant entre Deep house et dub techno, comme on en voit beaucoup aujourd’hui,
et n’enfilant pas les bangers comme des perles, mais méritant le titre d’opus
par sa consistance, sa cohérence et son sens du scénario, si l’on peut dire. Un
vrai voyage, un exercice de haute voltige que Jason allait reproduire l’année
suivante, avec un Future Thought tout
aussi réussi, alliant à la perfection l’atmosphère club d’alors (deep house et
minimale régnant en maître sur l’Europe) et les ambiances esthétiquement plus
osées de la dub techno. Entre temps, Gunnar Jonsson (Henrik de son vrai nom), Andreas Tilliander, Joel Alter ou encore
Luke Hess allaient étoffer un
répertoire qui grossissait alors à vue d’œil. Tilliander notamment, sous son
avatar Mokira, posait une grosse
pierre à l’édifice l’année dernière avec la parution de ses Time Axis Manipulation, triplette d’EPs
associés au LP du même nom, sur lesquels on pouvait retrouver les remixes de Silent Servant, Redshape et Echospace. Or,
voyez-vous, mes amis, Kontra-Musik ne perdant jamais une occasion de nous rendre heureux, alors que vient de paraître l'EP de remixes du Mod de Jonsson et Alter (sur lequel featurent Donato Dozzy, Minilogue et Dorisburg, rien que ça), les scandinaves ont en plus décidé de faire une compilation de leurs remixes il y a de cela deux mois. Pour notre plus grand plaisir, nous sommes amenés à réécouter ces pièces
d’orfèvres, luxe musical indécent, ou à découvrir ceux à côté desquels nous
sommes passés. Ainsi, la crème des reworks, reshapes, et autres dub mixes parus sur les EPs signés sur le
fameux K à l’accent sont dans ce various logiquement intitulé Kontra-Musik Mixes, et croyez moi, cette
compile est outrageusement jouissive. Entre Dub techno, Deep techno et Deep House, on passe du tout au tout avec des
artistes allant de Move D à Norman Nodge en passant par A Made Up Sound ou Shed. Pas une seconde n’est à
jeter, et 11 tracks plus tard, ceux qui ne la connaissaient pas se demanderont honnêtement comment ils ont pu passer
à côté d’une structure qui avait tant à offrir. Un bon moyen de se rendre
compte que le court hommage rendu à ce label était plus qu’un beau geste, une
évidence.
Friday, May 18, 2012
Vedomir - Vedomir
Vedomir, ça ne vous dit peut-être rien Vakula, sans doute plus. La perle d’Ukraine est de retour avec un
album fantasque, techniquement osé, et agréable à souhait.
Sous son alias Vedomir, Mikhaylo Vityk n’avait publié que deux maxis jusqu’à présent, un Not Classic Square très deep chez Soundofspeed, et un plus sophistiqué Loop Minusovka / Orthodox Ambient, une
face techno, une face ambient. Ces deux galettes mis à part, Vakula avait en
réalité fait parler de lui avec la petite vingtaine d’EPs qu’il avait sorti
sous son nom principal. Chez Shevchenko, Leleka ou encore 3rd Strike Records,
Vakula avait enchaîné les productions, remixes et autres collaborations depuis
2008. L’année dernière fût particulièrement productive pour lui, une année 2011
qui le vit publier pas moins de 11 EPs. Dans ce lot, un remarqué Leleka, un
vinyl partagé avec Steve Reich, et 3 pépites d’EPs chez Shevchenko, le second microlabel qu’il s’est empressé de créer après Leleka. Et depuis ? Eh bien
depuis, Vakula s’est à nouveau changé en Vedomir, et a composé un album qui
devrait donner un boost définitif à une carrière qui s’étoffait déjà pas mal.
Vedomir, c’est un roman house, une chanson de geste assez deep, et
définitivement dansante. Le Brahmagupta version jack, Roland muté en maître de
la disco. Une épopée qui semble ne
jamais finir (1h12, c’est assez long pour un album de house), avec ses hauts et
ses bas, ses moments de romance et ses scènes d’action, ses retournements de
situation, bref, un bon best-seller. Toujours dans une veine deep house
étudiée, Mikhaylo nous fait voyager comme rarement ; peu cette année ont
réussi à entretenir l’intérêt de leurs auditeurs avec tant de retenue et de subtilité,
ne nous laissant jamais accéder à la satisfaction finale de l’emportement et de
la danse extatique. Avec bon goût, Vedomir
ne vient pas ternir son LP par l’abus de voix cheap, elles ne servent ici qu’à
enjoliver des constructions musicales déjà suffisamment élaborées pour séduire.
En effet, la composition de Vedomir,
bien qu’il s’agisse d’un album de deep house classique, ne souffre pas d’un
manque d’originalité et cet album riche et varié métamorphose notre vision de
la house pérpétuellement pervertie par toute la merde tech-house actuelle qui
se répète et se mord la queue.
Vedomir est un simple brin d’air frais, un conte house romantique, une
douceur et un exotisme chaleureux, et bienvenus en ces temps de deep house
formatée et indécente. Dekmantel, l'écurie néerlandaise qui a sorti cette perle, fait parler d'elle depuis un certain temps, avec la sortie de maxis par Juju & Jordash, San Proper, et cette année Morphosis et Skudge. Elle a repéré le natif de Konotop il y a un an, et ne l'a plus lâché depuis. Tout ça pour dire que la voix du progrès, c’est l’Ukraine les amis. Comptez
sur moi pour vous le rappeler.
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Wednesday, May 16, 2012
Djorvin Clain - Pattern Of Thought
Permettez moi de vous présenter Djorvin Clain, le secret le mieux gardé de Belgique. Présenter est ici en réalité un bien grand mot, car même si vous n’êtes pas familiers du personnage, je n’aurais pas grand chose d’autre à vous apprendre que son origine, et sa date de naissance (1984). Il semblerait que M. Clain ne soit pas très intéressé par une plus ample révélation des détails de sa vie, ou alors il n’a tout simplement pas eu l’occasion, sa notoriété étant encore relativement restreinte. Toujours est-il que ces formalités accomplies, je peux désormais passer au point le plus important, sa musique. Elle est certainement l’unique raison de parler de cet homme mystère au nom atypique, mais quelle raison… J’ai découvert Djorvin Clain il y a de cela deux petites semaines, et je le considère aujourd’hui comme un des plus prometteurs successeurs de l’école dub de Basic Channel, celle des maîtres Moritz Von Oswald et Mark Ernestus, de ces géniaux expérimentateurs live, scientifiques du son et historiens sans pareils des différents genres et courants musicaux. Ces maîtres le sont devenus en créant la dub techno, et plus que tout lui ont donné une raison d’être, cette philosophie de la transcendance des genres à la techno, l’application de l’esthétique dub et l‘expérimentation live qui s’ensuit à un genre aujourd’hui très divers, mais à l’époque si réduit... Bien qu'il ne se serve que peu du fameux duo Berlinois comme influence musicale, Djorvin Clain en est le digne héritier, et Pattern Of Thought, son premier LP sous ce nom, en est la preuve.
Sunday, May 13, 2012
EP de la semaine
Metro Area, et ses géniaux MA
5 et 6, n’auront pas la
récompense hebdomadaire, je le crains, pusiqu’il s’agit d’une re-release. Xhin et Perc, malgré leurs brillants travaux groupés, ne l’obtiendront pas
non plus. Pas plus qu’ASC, Stay+ ou encore Regis. Non, cette semaine, pour trouver l’heureux élu, créateur du
meilleur EP de la semaine selon Shades of Sound, il fallait
se tourner vers la petite plateforme Sushitech.
Ce label berlinois déjà vieux de 7 ans a su attirer un paquet d’artistes à valeurs
ajoutées, confirmés ou naissants – on pense notamment à Delano Smith, Mikaël Stravostrand, Steve O’Sullivan,
ou plus récemment Mike Huckaby.
Cette fois-ci, c’est Makam, un des
poulains du label, qui décide de quitter l’étable Sushitech Purple pour la première fois et de se confronter aux vrais
pointures dans l’écurie principale du hara.
Dreams of Tomorrow est un EP savoureux, et divertissant, car le
Hollandais sait prendre son temps et nous faire passer d’un monde à un autre avec talent.
Entre les eaux de la deep house, et celles de la techno, Makam ne nous laisse pas une seconde de répit, alors que le
sentiment éprouvé est plus largement celui du repos. Ce maxi est donc
intéressant par le côté inexplicablement doux d’une musique qui démarre souvent avec un beat très accentué, assez violent même, dans la
mesure où rien ne nous permet d’envisqager l’incroyable progression que ces
tracks vont suivre. Après un ‘Unconscious’ assez simple mais qui fait office de
bonne introduction à l’univers de Guy
Blanken, c’est au tour de 'Sensations' de nous faire vibrer. Alors qu’une
fois de plus un rythme soutenu (accompagné d’une ligne de basse très
‘crosstown’ si vous voyez ce que je veux dire) nous amène à croire que l’hymne
tech-house est de mise, le morceau finit par se transformer en une exotique ballade dans un monde coloré de synthés échosés et de flûtes enchanteresses. À
mi-chemin, on a troqué la moiteur des clubs allemands pour l’humidité
sauvage des forêts équatoriales. Assez bouleversant, et assez réussi. Dans ‘Desire’,
le Hollandais ne met plus aucune ambiguïté dans son discours : les nappes sont aussi épasisses que les kicks sont profonds, et le tout est parcouru de chants suaves et cris
d’oiseaux ; enfin, Images,
peut-être le meilleur morceau de l’EP, avec sa ligne de basse faite au synthé
et loopée sur une mesure, est catchy à souhait. Au pays du sucre et du miel,
Makam est roi, car cette douceur sent l’été à s’en foutre plein le nez.
Contrastant avec un très upbeat ‘Self-Awareness’, Makam ne cache pourtant pas son talent de conteur avec ‘Lucid Dreaming’,
6 dernières minutes rêveuses et envoûtantes d’un EP décidément sous-estimé.
Makam, avec sa deep house chaleureuse et atypique, est un des
nouveaux noms sur lesquels il faut compter. Dreams of Tomorrow, ni exceptionnel, ni passable, a toutes les qualités d'un EP efficace, playlistable en de nombreuses occasions, et à noter sur les tablettes de tous les DJs d'afters ou de dimanches ensoleillés pour cet été. On m’a aussi dit beaucoup de bien de sa
prestation au Rex vendredi dernier, alors peut-être faudrait-il songer à
l’inscrire dans nos agendas dès que possible… En attendant, mettez Sushitech
sur vos petits papiers les amis, si vous ne l’avez pas déjà fait, car ils sont
loin d’avoir fini de faire parler d’eux.
Saturday, May 12, 2012
Actress - R.I.P
Insaisissable Darren… D’écoute en
écoute, je tourne et retourne dans ma tête les différentes possibilités. Le
sentiment est fort, mais la réaction inexplicable. Une confusion extrême,
indicible expression de la puissance partagée par cette musique. Une force, une
vivacité, un chatoiement… Un tison planté en plein cœur pour mieux nous ramener
à la vie. Insaisissable Darren… Tu nous avais titillé, chatouillé à peine en
2008 (Hazyville). Un grand début prometteur,
mais assez simple, finalement. En comparaison avec la notoriété acquise en 2010
(Splazsh), on se demandait presque si
tu t’étais gardé de nous révéler tout ton talent, petit cachottier.
Aujourd’hui, ton souffle rance et chaud m’a brûlé les poumons, et je ne sais
plus s’il faut faire le deuil de ta vie artistique ou se prosterner devant ton
apothéose. L’actrice révélée au théâtre de nos rêves les plus fous serait
devenue la star hollywoodienne destinée à toutes les mauvaises productions,
selon certains. Entendez-moi : il ne s’agit que de mauvaises langues, de
jaloux ; tout comme souvent dans ce jeu de la critique, et ici plus
particulièrement, il ne s’agit que de hype, d’attentes, et d’âmes vendues. Actress, c’est le faussaire, l’imposteur, le roi des sacrilèges chez les uns. Chez d’autres, un Jésus
Christ, venu sauver la musique électronique de ses démons, et prendre sur lui
le péché originel du formatage, quitte à se faire crucifier par les
connaisseurs. Actress, c’est surtout
une énigme résidant dans notre impossibilité à nous convaincre de son talent pourtant évident.
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Sunday, May 6, 2012
Sélection #2 - Printemps
À l’heure du téléchargement en quelques clics, de la surproduction et de la surconsommation de musique, un weekend, c’est long, et une semaine de retard devient un lourd fardeau. Parce que je suis né après 1990, il m’est impossible de prétendre aimer digger à la manière des anciens, sans se presser, en s’imaginant que le temps qui nous est imparti tend vers l’infini. Je suis de cette race de boulimiques du son, qui enragent de n’avoir que 24h dans une journée, qui se confrontent inlassablement et en vain aux limites que la durée des morceaux leur impose, et qui ne connaissent la satiété qu’à l’heure du live. Ainsi, je dois confesser que - vacances oblige - rester éloigné de la musique pendant plus d’une semaine m’a paru une éternité. Plus encore, l’impossibilité de chroniquer tout ce que j’avais écouté voracement par la suite (trop grosse quantité ingurgitée en trop peu de temps) me rendait furieux. J’ai donc décidé qu’il était temps d’abréger mes souffrances et de passer à la seconde sélection de ce blog. Une sélection que j’ai choisi de diviser par genres. Puisque mon travail était déjà primaire, pourquoi ne pas aller au bout de mon entreprise de simplification de cette savoureuse compilation ?
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